Le CQAM remet en cause le bien-fondé de la plateforme culturelle de Télé-Québec

La Youtubisation de Télé-Québec : une stratégie gagnante ou une vitrine de plus ?

Le 26 mars dernier, dans le cadre de la campagne électorale le candidat dans Bourget Maka Kotto a énoncé les grandes lignes de la Stratégie culturelle numérique du Parti Québécois dont Télé-Québec sera le mur «porteur».

 

Avec le lancement récent de la Fabrique culturelle, Télé-Québec propose non seulement une agrégation des contenus dans une vitrine électronique, mais une uniformisation de la production culturelle. Cette Youtubisation de la production culturelle peut sembler une bonne idée de prime abord, mais elle n’est pas porteuse d’une vision à long terme du rayonnement de la culture québécoise. En mettant en ligne une offre culturelle abondante, sans balises, les contenus les plus riches au plan artistique se trouvent noyés dans une mer de propositions. Qui plus est, proposer du contenu culturel en ligne ne règle en rien les problèmes de fond que vivent les artistes et ne contribue que faiblement à la diffusion de leurs œuvres auprès de leurs concitoyens. Par ailleurs, la position de la Fabrique culturelle comme diffuseur de référence résultera en une concentration de l’offre et risque de mener à une ghettoïsation de la culture québécoise

 

Évidemment, nous ne pouvons que saluer le lancement de la Stratégie culturelle numérique, mais celle-ci doit servir d’abord les créateurs de contenus, soit les artistes et les producteurs artistiques. Créer des œuvres artistiques coûte cher, c’est connu, mais créer des capsules de contenu artistique coûte également de l’argent si on vise à diffuser une production de qualité.

 

Nous soutenons l’idée de vouloir souligner la vitalité culturelle québécoise or, cela ne doit pas se faire sans rémunérer les principaux acteurs. Qu’en est-il de toutes les batailles concernant le droit d’auteur et les droits de diffusion des artistes que le Québec mène depuis les cinquante dernières années ? La Youtubisation proposée par la Fabrique culturelle amènera non seulement l’appauvrissement des artistes et des producteurs de contenus, mais également de la culture québécoise dans son ensemble précisément quant au type de licence proposée. http://www.lafabriqueculturelle.tv/conditions-utilisation

 

Actuellement, le budget du Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ) pour les artistes et les organismes en arts médiatiques (cinéma/vidéo expérimental et arts numériques) n’est que d’environ 4,5 millions et que la Société de développement des entreprises culturelles (SODEC) n’apporte aucune aide financière à la discipline des arts numériques. De ce fait, l’essor des arts médiatiques au Québec se voit actuellement entravé puisqu’il passera nécessairement par l’accroissement du budget du CALQ et par une mise à jour des programmes de la SODEC. Sans oublier l’inclusion des artistes en arts médiatiques dans la Loi sur le statut de l’artiste.

 

S’il est effectivement temps pour le Québec de se doter d’une stratégie numérique et de l’inclure dans une nouvelle politique culturelle, celle-ci doit d’abord être portée par ses artistes et demeurer ouverte sur le monde. Et si l’heure est aux politiques culturelles, elles se doivent d’introduire des stratégies de rémunération des artistes, d’inclusion des publics, d’un plan d’acquisition des œuvres par les institutions publiques et des mesures d’accès aux marchés internationaux.

 

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