La peur de la mort et autres peurs

Kathryn Ruppert-Dazai
Vernissage le 5 mars dès 15 h

Démarche artistique

Je rêve souvent que je fais continuellement la roue en l’air, tout juste au-dessus des mains de l’homme qui veut me tuer. Bien que j’atterrisse fréquemment, il ne m’attrape jamais.

Je sais que le monde change constamment et que la vie est éphémère, mais cela me chagrine. Presque quotidiennement, je lutte avec moi-même pour maintenir l’équilibre, bien que l’équilibre soit en opposition avec le provisoire qui conditionne la vie. Jusqu’à présent, j’ai eu de la chance. Mes parents sont encore amoureux l’un de l’autre, je n’ai jamais été violée, je n’ai pas encore le cancer, je me considère donc privilégiée. Mais je me dis que moins je serai heureuse, moins j’aurai de chance de perdre. Une bonne vie se paie et ce prix est la peur, la peur du moment où notre heure sera venue, où le spectre de la mort et de la destruction viendra nous visiter. La honte et la culpabilité sont la contrepartie de ma vie agréable, et m’inquiéter est la seule chose que je puisse faire pour maintenir cette vie et peut-être éviter un changement pour le pire.

La crainte de la mort et autres craintes est le titre d’une nouvelle série semi-autobiographique qui dépeint l’existence des créatures inquiétantes qui m’habitent. Je me suis posé beaucoup de questions au sujet de mes peurs, cherchant à les reconnaître et à les nommer pour en comprendre l’origine et les conséquences. On entend souvent dire que nous créons ce que nous craignons. Si telle est la vérité, une plongée dans l’antre de la peur devrait engendrer un processus créatif fructueux, car livré èa soi-même, ces craintes ne peuvent que se déculper.

Nous avons tous des angoisses non exprimées qui, tapies au fond de nous, nous hantent. J’ai donc décidé d’exorciser mes peurs, de les affronter et de les utiliser comme source de beauté. Voilà l’assise de ma démarche.

Au cours des sept derniers mois, j’ai compilé une liste de mes peurs. Elles ont servi de ligne directrice à cette nouvelle série de tableaux textiles grand format. La crainte de la mort et autres craintes s’inscrit dans la foulée de mon travail sur le textile – technique que j’explore et développe depuis plus de sept ans – où l’utilisation du fil de laine. Le tout donne lieu à des univers qui relèvent de l’art du conte visuel. Poussant plus loin cette démarche, j’ai commencé à incorporer dans mes tableaux des matériaux non traditionnels tels le carton, le chanvre, les poils de chiens, la soie, la laine d’acier, les rideaux de douche en plastique, la corde, l’aluminium, la dentelle, els sacs à déchets, les paillettes et le papier non blanchi.

Par ces « contes » tricotés, dont le rendu est intentionnellement san menace – un peu comme un motif de Château de Greyskull sur une chandail fait à la main – je cherche à susciter un sentiment de réconfort chez le spectateur, en lui procurant une expérience humaine et sensorielle. J’utilise une imagerie animale pour représenter des traits de caractère humains et, par l’aspect tactile de la laine, je veux inciter le spectateur à toucher les oeuvres et à poser des questions, stimuler l’interaction entre le spectateur et les oeuvres.

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