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Zocalo présente : Perspectives excentrées
Perspectives excentrées est une exposition temporaire qui réunit huit artistes au Carré Isidore-Hurteau, à Longueuil, autour de la thématique très vaste de la banlieue.
L’exploration de ce thème a donné lieu à des interprétations et des regards différents chez chacun et chacune des artistes. L’éventail de perspectives présentées en ce lieu traite d’enjeux liés à l’histoire personnelle, à l’autoreprésentation, à la participation citoyenne, à l’aménagement du territoire, à la nature… Cette pluralité des points de vue permet de dégager une vision incarnée et actuelle, loin des stéréotypes qui sont parfois associés à la vie hors de la métropole. Les œuvres prennent la forme de drapeaux, de bannières ou d’images suspendues, en utilisant autant le mobilier urbain que les arbres pour se déployer dans l’espace. Se faisant, elles se révèlent au gré des déambulations des spectateurs et spectatrices, qui sont invité.e.s à venir à leur rencontre.
Brandir un drapeau, c’est affirmer son appartenance, c’est dire quelque chose de soi, c’est prendre position. C’est dans cet esprit que Sabina Rak propose une relecture du drapeau du Québec, afin de refléter la diversité d’aujourd’hui dans un symbole visuel puissant d’identité commune. Jocelyne Thibault s’interroge aussi sur le sentiment d’appartenance, cette fois en explorant le rapport des Longueuillois et Longueuilloises avec leur ville. Le drapeau qu’elle présente sera en constante évolution, au fur et à mesure que les participant.e.s qui accepteront de se prêter à l’exercice y apposeront leur signature*. Anna Jane McIntyre a aussi développé son œuvre en relation avec les autres, en l’occurrence des enfants de l’École Primaire St. Gabriel Elementary School à Montréal. Leur demandant de réfléchir aux aires de jeux que l’on trouve dans les parcs publics, elle a créé avec eux un drapeau qui reflète une vision inclusive, avec des plantes, des espaces pour les animaux et pour les humains de toutes origines, habilités, âges et tempéraments. L’œuvre d’Anna Binta Diallo interroge aussi l’identité par une forme de nostalgie de la banlieue idéale et idéalisée, tout en posant un regard critique quant à l’expectative d’un mode de vie uniformisé. Cela se manifeste en outre dans le détournement de l’imagerie publicitaire qui promet un rêve souvent hors de portée.
Plusieurs artistes soulignent également le lien entre la banlieue et la nature où les espaces verts se font plus présents qu’en zones urbaines. Les images empreintes de poésie de Chloé Beaulac mettent les plantes à l’avant-plan. Avec finesse, l’artiste exploite le numérique pour transformer ses photographies et créer ainsi de nouveaux mondes. Le collectif La Trame, formé de jeunes artistes, superpose l’image à l’environnement en proposant la « réparation » symbolique d’un arbre penché. L’œuvre, faite d’une contre-forme imprimée qui se moule à la courbure de l’arbre pour en corriger l’axe, se veut une réflexion ludique sur le concept de normativité et sur le besoin de « corriger » tout ce qui dépasse des marges. Résidente du Vieux-Longueuil, Geneviève Cadieux-Langlois a aussi travaillé à partir de la végétation du Carré Isidore-Hurteau. Elle a porté son attention sur le calendula, une fleur largement répandue à proximité des villes et qu’elle identifie comme un symbole de résistance face à l’urbanisation croissante. Finalement, Charles-Antoine Blais-Métivier explore lui aussi le paysage suburbain, mais en tournant son regard sur les tours de signaux 5G. Ces structures qui suscitent autant la méfiance que la promesse d’un monde perpétuellement connecté brouillent les frontières territoriales en démocratisant l’accès à la technologie. Éventuellement, on peut penser qu’elles rendront obsolètes toutes délimitations entre villes, villages et banlieues.
– Texte de Marie-Pier Bocquet, commissaire