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The Margin Maker / Un tas de marge de Pascaline Knight et Max Lupo

Vernissage le jeudi 14 septembre à 17h à Arprim

La plupart du temps, dans un cahier ou sur une feuille lignée standard, un trait vertical divise la surface en deux types d’espaces ; là où s’écrivent le texte, puis la marge. D’emblée, une certaine hiérarchie s’établit entre ces deux zones. La marge sert généralement aux corrections, aux commentaires ou à des notes, subordonnés à la proposition principale. Cette manière conventionnelle de structurer la page agit nécessairement sur la construction même de nos pensées et notre façon de les organiser dans un texte. Mais que se passe-t-il lorsque nous nous affranchissons d’un cadre rigide ?  Le corps du texte peut-il déborder des lignes ? Le contenu de la marge peut-il prendre corps à l’extérieur de cette dernière ?

Pascaline Knight et Max Lupo transposent ces questionnements dans la salle d’exposition avec leurs automates générateurs de dessins. Les machines bougent très lentement, leur trajectoire est à peine perceptible. Le dispositif fonctionne, il accomplit la tâche pour laquelle il a été conçu ; tracer inlassablement des marges concentriques sur une feuille. En choisissant la circularité, les artistes en appellent à des formes et des mouvements qui s’éloignent des configurations traditionnelles de l’écriture. Ils brouillent complètement les limites habituelles de la page et évoquent une pensée non linéaire.

Par ailleurs, en concevant une machine dont le seul objectif est de tourner en rond, Knight et Lupo pointent, non sans humour, l’omniprésence et la surabondance de la technologie dans nos vies. Dans notre recherche constante d’efficacité, notre réflexe est souvent de se tourner vers elle pour nous appuyer. Or, ce soutien devient parfois si important que l’on en vient à perdre en autonomie. Le théoricien Marshall McLuhan nous fait d’ailleurs remarquer que chaque extension de l’être humain, surtout technologique, provoque également une amputation. Cette perte peut en être une d’habileté, mais l’on peut aussi la réfléchir en termes de connexion. Car les avancées technologiques qui rythment notre quotidien participent certainement à notre retrait, de plus en plus marqué, de la nature et de notre environnement.

Les lignes imprimées sur le papier sont la seule preuve de la productivité de la machine. Comme une assistante dans l’atelier, elle attend d’être assignée à un travail, puis s’exécute. Elle ne remet pas en question l’utilité de sa fonction. Ici, elle agit comme une prolongation du geste de l’artiste. À la fin de chaque séance, elle aura fabriqué un tas de marges, mais elle aura aussi gravé le processus dans le temps. Malgré la constance, les traces irrégulières, d’épaisseur et d’intensité variables, laissent voir les erreurs et les limites du mécanisme et nous ramènent à l’importance du geste humain, dans ce qu’il a d’imprécis et de vivant.

– Texte d’exposition d’Emmanuelle Choquette

Pascaline Knight utilise des procédés de gravure, de dessin, d’écriture, de microédition, d’animation stop-motion en insérant son corps dans ses installations pour révéler les interstices de l’être. Jusqu’à récemment, elle utilisait l’emblématique Cahier Canada, utilisé à l’école primaire pour l’apprentissage de l’écriture.

Titulaire d’un Baccalauréat en arts visuels de l’Université Concordia (1996), elle obtient sa maîtrise en art, médias et design interdisciplinaires à l’Université OCAD (2017). Son travail a été exposé au Canada et à l’international, notamment dans les foires d’édition Tirage Limité à Lausanne et Toronto Art Books Fair (2019), ainsi qu’en solo à Open Studio (Toronto, 2019). Elle est récipiendaire d’une résidence de recherche du CALQ (Basel, 2019), d’une micro-résidence dans les archives d’Artexte (Montréal, 2019), et a été soutenue par le CAC lors de résidences à Agalab (Amsterdam, 2018) et au Kala Arts Institute (Berkeley, 2020). Ses livres peuvent être consultés à la bibliothèque de livres rares Thomas Fisher, à la bibliothèque de l’Université York à Toronto, à la BAnQ à Québec et au Musée Cantonal de Lausanne.

Max Lupo est un artiste multimédia travaillant en Ontario, qui fabrique des inventions parfois curieuses et étranges. À travers sa pratique, il cherche à trouver du sens dans les processus, de la valeur dans la traduction et de la créativité dans les choses incongrues et dans tout ce qui est mis de côté. En 2017, Max a obtenu une Maîtrise en arts visuels d’OCADU dans le programme Art, Média et Design Interdisciplinaire.

Max a participé à plusieurs expositions, notamment en solo au Georgian College’s Campus Gallery, ainsi qu’à la galerie VERSO, située sur la rue Queen Street West à Toronto. De plus, il travaille en tant que chargé de cours au Georgian College et comme bibliothécaire communautaire pour Innisfil ideaLAB & Library.