Artiste : Laurence Beaudoin Morin, atelier d'art performance au centre d’artistes en art actuel AdMare / crédit photo : Antonin Monmart

Ras-le-bol : dénonciation des conditions salariales précaires dans les centres d’artistes autogérés du Québec

Nous, les membres du Regroupement des centres d’artistes autogérés du Québec (RCAAQ), nous mobilisons pour exprimer notre désarroi face aux conditions salariales précaires qui caractérisent le milieu de l’art actuel.

Les centres d’artistes autogérés sont les racines de la création en art actuel et ont besoin d’être nourris et enrichis. Ensemble, nous représentons un réseau unique et effervescent, générant une grande richesse de pratiques artistiques et organisationnelles au Québec.

Notre écosystème et celui des arts visuels en général, souffrent pourtant d’un manque flagrant de visibilité et de soutien financier. Aggravée par la pandémie, la précarité des conditions de travail et salariales dans nos organismes demeure une des plus marquées parmi les secteurs culturels. Alors que les barèmes RAAV/CARFAC pour le paiement des artistes ont été revus à la hausse et majorés pour les quatre prochaines années, il est maintenant impératif d’élever le plancher salarial minimal pour les travailleur.euse.s des centres d’artistes et de reconnaître la juste valeur d’une main-d’œuvre hautement qualifiée et souvent très scolarisée.

La récente étude conduite par le RCAAQ en collaboration avec l’INRS, Financement et ressources humaines dans les centres d’artistes membres du RCAAQ, révèle un important retard salarial dans notre milieu. Des salaires de base et des conditions de rémunération en deçà du marché compliquent la rétention des compétences au sein des équipes. Cela contribue à une fragilisation structurelle et à l’épuisement professionnel dû à une charge de travail trop écrasante. Cette situation entrave le développement organisationnel et économique, ainsi que la capacité à soutenir les artistes adéquatement : qu’il s’agisse de leur offrir des redevances conséquentes aux exigences de la nouvelle Loi 35 ou encore à promouvoir leurs œuvres auprès de publics plus variés. La consolidation des centres d’artistes est donc primordiale et représente une véritable condition d’existence pour les artistes en art actuel.

Face à l’inflation galopante depuis 2017, les coûts de fonctionnement ont considérablement augmenté (matériaux, transport d’œuvres, assurances, loyer, etc.) sans être amortis par une augmentation conséquente du financement. La stagnation des salaires qui en résulte entraîne un affaiblissement intolérable des conditions de travail. Pour arriver à accomplir nos missions et offrir des services de qualité, il devient indispensable de rémunérer les travailleur.euse.s des centres non seulement à la hauteur de leur compétences, mais aussi au coût réel de la vie, leur permettant une vie digne et sans pauvreté.

Le manque à gagner est estimé à plus de 16 M$ sur quatre ans pour rémunérer correctement les travailleur.euse.s et les artistes des centres soutenus par le programme «Soutien à la mission» du CALQ. Notons cependant que ce montant est nettement insuffisant si l’on considère les hausses relatives aux autres coûts d’opération et des besoins de nouveaux demandeurs. Face à cette situation, nous appelons les instances politiques et les bailleurs de fonds à reconnaître leur pouvoir sur la situation et à effectuer un investissement significatif dans le fonctionnement des centres d’artistes, voire à doubler le budget qui leur est consacré. Cette mesure nous aiderait enfin à remédier à l’insuffisance des montants alloués aux ressources humaines, à l’incapacité d’honorer les redevances aux artistes conformément à la Loi 35, et à l’invisibilité persistante des arts actuels dans les médias, entravant ainsi l’accessibilité des œuvres à un public plus large.

Avec ce communiqué, nous, les travailleurs et travailleuses des centres d’artistes, souhaitons sortir de l’ombre et manifester publiquement notre ras-le-bol!

Pour toute demande d’information supplémentaire, veuillez contacter : Catherine Bodmer, directrice générale : direction@rcaaq.org

À lire dans ledevoir.com, article de Catherine Lalonde,


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Raphaël Ouellet,

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