I love to sail forbidden seas, and land on barbarous coasts.
— Herman Melville, Moby Dick
Poème barbare
Le photographe Alain Lefort décomplexe la représentation picturale du classique tandem ciel-mer en cassant son horizon, en lavant ses bleus, ses verts, ses cris de goélands et son miroitement, à la recherche d’une marine vierge, ou d’une vierge marine. Neuf photographies émergent de ces essais « barbares » et viennent joliment boucler deux séries antérieures de grands formats : 182 soleils (2005) et De l’éternel azur à la sereine ironie (1999-2007). Ces trois séries ont pour dénominateurs communs un certain minimalisme et une lumière brute matérialisée lors de la prise grâce à un boîtier défectueux ou à des films périmés, laissant sur la pellicule les vestiges d’un rayon. Dans ce triplé, le naturalisme de la scène est saboté par le truchement d’une infraction typiquement dada. Le photographe avance ainsi à l’aveuglette, plaque par plaque, et par ce jeu, semble retourner l’arme contre lui pour en ressentir la douce détonation. Ici, la particularité (lumière) et la généralité (paysage) se télescopent pour évacuer le sujet au nom de ses tropes, de son poème fluvial.
Dans ce plus récent projet, Lefort brouille davantage les repères en redressant le format standard du paysage à la verticale, déterminé à en faire un portrait. L’œil du fleuve renvoie pour ainsi dire à celui du photographe, suivant le battement naturel d’une paupière qui s’ouvre et se referme sur une même scène. Paupière dont les cils seraient encore mouillés par l’éclaboussure des vagues. La répétition du point de vue — et non de l’image — suit ce léger décalage mis en évidence par le mouvement de balancier de l’embarcation. Grâce à un appareil de presse (press camera), tenu près du corps à hauteur de torse et sans trépied, le photographe cherche plutôt à interpréter manuellement ce que le regard fixe à distance dans le viseur, d’où l’angle approximatif de l’horizon.
Avec Melville, Lefort transgresse les interdits en troublant la photo de sa lumière la plus crue.
— Extrait du texte Poème barbare d’Annie Lafleur, 2015
Alain Lefort est né à Montréal (Canada) en 1968, où il vit et travaille actuellement. Il a étudié la photographie à l’Université Concordia à Montréal. Il s’inscrit dans le paysage artistique montréalais depuis 1992.
Son travail est diffusé en permanence à Montréal et à Québec par Lacerte Art contemporain ainsi qu’à Neubacher Shor Contemporary à Toronto.
Alain Lefort compte à son actif plus d’une cinquantaine d’expositions tant individuelles que collectives au Québec comme à l’étranger (Albanie, États-Unis, Portugal…). Ses œuvres ont notamment été acquises par le Cirque du Soleil, le Musée national des beaux-arts du Québec, Loto-Québec et UMA (la Maison de l’image et de la photographie). Son travail a aussi fait l’objet de nombreuses publications.
I love to sail forbidden seas, and land on barbarous coasts.
— Herman Melville, Moby Dick
Poème barbare
Le photographe Alain Lefort décomplexe la représentation picturale du classique tandem ciel-mer en cassant son horizon, en lavant ses bleus, ses verts, ses cris de goélands et son miroitement, à la recherche d’une marine vierge, ou d’une vierge marine. Neuf photographies émergent de ces essais « barbares » et viennent joliment boucler deux séries antérieures de grands formats : 182 soleils (2005) et De l’éternel azur à la sereine ironie (1999-2007). Ces trois séries ont pour dénominateurs communs un certain minimalisme et une lumière brute matérialisée lors de la prise grâce à un boîtier défectueux ou à des films périmés, laissant sur la pellicule les vestiges d’un rayon. Dans ce triplé, le naturalisme de la scène est saboté par le truchement d’une infraction typiquement dada. Le photographe avance ainsi à l’aveuglette, plaque par plaque, et par ce jeu, semble retourner l’arme contre lui pour en ressentir la douce détonation. Ici, la particularité (lumière) et la généralité (paysage) se télescopent pour évacuer le sujet au nom de ses tropes, de son poème fluvial.
Dans ce plus récent projet, Lefort brouille davantage les repères en redressant le format standard du paysage à la verticale, déterminé à en faire un portrait. L’œil du fleuve renvoie pour ainsi dire à celui du photographe, suivant le battement naturel d’une paupière qui s’ouvre et se referme sur une même scène. Paupière dont les cils seraient encore mouillés par l’éclaboussure des vagues. La répétition du point de vue — et non de l’image — suit ce léger décalage mis en évidence par le mouvement de balancier de l’embarcation. Grâce à un appareil de presse (press camera), tenu près du corps à hauteur de torse et sans trépied, le photographe cherche plutôt à interpréter manuellement ce que le regard fixe à distance dans le viseur, d’où l’angle approximatif de l’horizon.
Avec Melville, Lefort transgresse les interdits en troublant la photo de sa lumière la plus crue.
— Extrait du texte Poème barbare d’Annie Lafleur, 2015
Alain Lefort est né à Montréal (Canada) en 1968, où il vit et travaille actuellement. Il a étudié la photographie à l’Université Concordia à Montréal. Il s’inscrit dans le paysage artistique montréalais depuis 1992.
Son travail est diffusé en permanence à Montréal et à Québec par Lacerte Art contemporain ainsi qu’à Neubacher Shor Contemporary à Toronto.
Alain Lefort compte à son actif plus d’une cinquantaine d’expositions tant individuelles que collectives au Québec comme à l’étranger (Albanie, États-Unis, Portugal…). Ses œuvres ont notamment été acquises par le Cirque du Soleil, le Musée national des beaux-arts du Québec, Loto-Québec et UMA (la Maison de l’image et de la photographie). Son travail a aussi fait l’objet de nombreuses publications.