Charles-André Coderre, Granular Film – Beirut, 2016

L’image en soi, exposition du 14 octobre au 7 janvier au Musée d’art de Joliette

Le Musée d’art de Joliette s’associe pour la première fois avec Vidéographe afin de présenter quatre courts-métrages issus des collections de ce centre d’artistes montréalais.

Dans un monde médiatique dominé par la narration et le spectaculaire, le cinéma expérimental a de quoi déconcerter. Il nous invite à découvrir un autre langage de l’image, d’autres techniques, d’autres esthétiques à l’aune de démarches hautement personnelles.

Les quatre films des artistes Louise Bourque, Charles-André Coderre, Clint Enns et Mike Hoolboom rassemblés dans ce programme témoignent de la vitalité méconnue du cinéma expérimental contemporain au Québec et au Canada. Ils explorent, chacun à leur manière, les possibilités expressives propres à la pellicule argentique : le grain, la rayure, la dégradation photochimique, le vieillissement. La texture de l’image, ses couleurs, sa vitesse et sa lisibilité ou son abstraction deviennent les matériaux premiers des artistes, auxquels s’ajoutent un travail du son et du mot écrit ou parlé. Ces films créent ainsi de riches univers mentaux traversés par les souvenirs, la perte, la nostalgie ou le manque.

Dans Colour My World (3 min, 2017) de Mike Hoolboom, la rencontre de la pure abstraction de l’image avec la puissance d’évocation du texte poétique rend l’identité du «nous» et du «je» incertaine et englobante, touchant l’intime et le politique. De la somptuosité des effets visuels de Granular Film – Beirut (6 min 11 s, 2016) émerge des fragments de souvenirs de voyage qui, dira Charles-André Coderre, « ont maintenant leur propre vie séparée de mon existence ». Dans Summer Song (4 min 59 s, 2014) réalisé par Clint Enns, le grain de l’image 8 mm évoque les films de famille et les images du passé, alors que le montage fragmenté rappelle les sauts et les failles de la mémoire. D’une grande complexité, Auto portrait / Self Portrait Post Partum (13 min 10 s, 2013) dissèque la perte amoureuse, aux frontières des archétypes et de l’intime : musique pop, citations, autoreprésentation et interventions sur l’image semblent tour à tour dévoiler et trahir le vécu de Louise Bourque. L’image devient ainsi à la fois « un miroir et une porte »*, une échappée de soi, une image en soi.

Karine Boulanger, conservatrice, Vidéographe
* Mike Hoolboom, Colour My World, 2017
À PROPOS DE VIDÉOGRAPHE —

Voué à la recherche et à la diffusion de formes artistiques nouvelles en lien avec les enjeux sociaux, politiques et technologiques actuels, Vidéographe s’attache à explorer les approches narratives et documentaires non conventionnelles par le biais, entre autres, de l’art vidéo, de l’animation et des arts numériques.

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