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Josianne Poirier, Plus que deux (documentation de la publication imprimée à 100 exemplaires), Dare-Dare et Le clinique, 2021. / karen elaine spencer, walkin’ with cohen (mur), 2021, photo A. J. Stephen.
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Karen elaine spencer et Josianne Poirier

En résidences jusqu'au 25 octobre à AdMare

Présentée par AdMare, centre d’artistes en art actuel des Îles-de-la-Madeleine, en collaboration avec la Société de conservation des Îles-de-la-Madeleine

Intime, la résidence de karen elaine spencer fait resurgir des souvenirs d’enfance chez l’artiste. Son arrivée aux Îles-de-la-Madeleine, loin du pavé des rues de Montréal, indique un déplacement vers une insularité déjà connue. Une sensation de retour la hante, elle qui enfant vivait dans une petite ville accessible uniquement par bateau, située à la pointe nord de l’île de Vancouver. S’éveillent la morsure aiguë de l’air salé, la faim froide du vent et le fantôme planant de son corps d’enfant sans importance – perché sur un rocher, bras minces enroulés autour de ses genoux osseux et yeux tournés vers les vagues qui se brisent sur le rivage encore et encore et encore…

Nous avons tou·te·s nos îles; ces endroits que nous gardons dans nos mémoires, vus à travers la brume et la semi-obscurité, qui ne deviennent jamais tout à fait réels. Et que nous disent-ils ? Et que peut-on leur donner ? Le vent porte-t-il une chanson ?

L’artiste imagine une silhouette qui marche. Un personnage solitaire tenant une chanson. Cette chanson est fragmentée, brisée; tirée de la plume commune du poète Leonard Cohen et de l’autrice-compositrice Sharon Robinson. C’est le point d’ancrage de la démarche de karen elaine spencer : ces paroles déplorent notre perte d’innocence et l’état d’un monde déjà et à jamais refermé sur nous. Cette figure solitaire qui déambule porte une pancarte sur laquelle ces paroles sont écrites, comme un bouclier, comme un vêtement protecteur, comme un talisman invoquant sinon la magie, du moins une malédiction amoureuse. La figure qui marche n’est pas un enfant, la figure qui marche n’est plus un enfant.

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Pendant sa résidence de commissaire, Josianne Poirier travaillera de pair avec AdMare et la Société de conservation des Îles-de-la-Madeleine (SCÎM) afin de préciser le thème d’un programme de résidence d’artistes qui s’étalera sur une période d’un ou deux ans, à compter de l’été 2022. L’amorce de ce cycle cherche à permettre à la commissaire de définir la liste des artistes qui y participeront et d’étendre sa propre connaissance du territoire qui les accueillera, la future programmation artistique prenant place dans les milieux naturels protégés par la SCÎM.

Abordant la propriété du sol comme thématique générale de sa recherche commissariale, Josianne Poirier sondera l’action qui se situe au fondement même des activités de la SCÎM : le fait d’acheter des parcelles au bénéfice de la collectivité. Cette approche de la propriété, contraire à ce que l’on observe dans une société qui tend à en privilégier les usages privés, apparaît porteuse d’un grand altruisme et d’une précieuse attention au partage des milieux de vie. La propriété du sol conduit à considérer la matérialité des lots acquis et ouvre sur des questions qui concernent l’érosion, l’exploitation agricole et forestière, les systèmes alimentaires, etc. Qu’elle soit abordée dans sa dimension légale ou matérielle, la propriété du sol oriente ses usages. Les terres préservées par SCÎM présentent un croisement manifeste entre ces deux dimensions, et incitent à une réflexion sur le devenir commun.

BIOGRAPHIES

karen elaine spencer est née en quatre temps. L’année du poisson d’argent; sa vraie naissance. Sa jeunesse : née en chantant doucement des chansons inventées à des mouchoirs chiffonnés sur le siège arrière de la voiture familiale. Son adolescence : née à travers sa fuite de la maison pour étudier les beaux-arts de l’oubli. Actuellement : re-née par son infiltration des bureaux gouvernementaux, des stations de train et de métro, puis des parcs, pour transmettre des messages secrets. Elle erre, flâne, prend le métro, écoute les rêves.

Josianne Poirier oriente ses recherches autour de pratiques artistiques s’infiltrant dans les espaces publics, manière d’aborder par le fait même le façonnement du paysage et les politiques culturelles municipales. Sa thèse de doctorat en histoire de l’art, qui portait sur la fantasmagorie des lumières de la ville, a remporté le prix Jean-Pierre-Collin 2018 du réseau Villes Régions Monde. Un essai tiré de ce texte paraîtra aux éditions Lux en 2022. Josianne est chargée de cours à l’Université du Québec à Montréal et à l’Université de Montréal, où son enseignement se préoccupe également de la production de l’espace et des formes du vivre-ensemble. Elle a siégé plusieurs années à titre d’experte et de spécialiste en arts visuels pour la politique d’intégration des arts à l’architecture et à l’environnement du gouvernement du Québec.