SONS ORNEMENTAUX : QUATRE-VINGT ANS DE SONS SYNTHÉTIQUES AU CINÉMA.
Présenté avec Available Light Screening Collective, au Studio de Daïmôn, le 27 novembre 2013 à 19h30.
Peu de temps après que la technologie sonore au cinéma se soit développée, à la fin des années 1920, des artistes commencèrent à proposer de nouvelles avenues afin d’utiliser le lecteur de son optique du projecteur et produire de nouveaux sons, entièrement synthétiques. C’est ainsi que toute image ou objet placé sur la bande son de la pellicule de film put enfin se traduire en son lors de la projection.
Le célèbre compositeur John Cage a eu cette réplique fameuse dans son essai «The Future of Music : Credo» (1958), en se référant au son synthétique du film :
Il est maintenant possible pour le compositeur de produire une musique directe, sans le soutien de performeurs. Toute forme gravée, répétée assez souvent sur une trame sonore peut être audible. 280 cercles par seconde sur une trame sonore produiront un son et même le portrait de Beethoven répété cinquante fois par seconde sur une bande sonore aura non seulement une accentuation différente, mais encore une qualité sonore distincte.
Cage avait pris connaissance du son synthétique au cinéma des années auparavant, alors qu’il travaillait comme assistant d’Oskar Fischinger. Le film de Fischinger présenté dans ce programme, Ornament Sound (1932) est le plus ancien exemple de film avant-gardiste usant du son synthétique sans chercher à imiter des sons réels, mais en créant de nouveaux sons inimaginables auparavant.
Cette capacité du film à traduire des images en sons continuera de fasciner à la suite les cinéastes et ce programme rassemble plusieurs figures canoniques du genre, tels que Fischinger, Norman McLaren, Barry Spinello et Richard Reeves. Des cinéastes récents ont pu proposer quelques nouveaux tournants, tels Davis Gatten et Jodie Mack. Quelques uns de ces films contiennent des sons créés méticuleusement en posant des images directement sur la bande-son (Fischinger, McLaren, Spinello, Reeves – c’est aussi le cas pour mon travail, qui sera présenté en deuxième partie de ce programme). D’autres cinéastes altèrent le ratio de l’image de telle sorte que la part accordée à la bande-son soit plus grande (Gatten, Mack). Plusieurs des films présentés dans ce programme sont un défi lancé aux spectateurs. Venez voir/écouter pour vous mêmes des sons jamais entendus autre part, dans ces films incroyables qui remettent en jeu toute conception normative du cinéma !
– Kelly Egan, programmatrice
1ere partie
Films de Kelly Egan
Ransom notes 5 min., 35mm, Couleur, Sound, 2011.
A Firefly 2 min. 35mm, Noir et blanc, Sound, 2007.
C: won eyed jail 5 min., 35mm, Couleur, Sound, 2005.
Transparent “c” 3 min., 16mm, Couleur, Sound, 2005.
Mary/me 4 min., 16mm, Couleur, Sound, 2004.
Object/loss 4 min., 16mm, Noir et blanc, Silent, 2004.
Breath 3 min., 16mm, Couleur, Son, 2003.
Bodies of Knowledge 5.5 min., 16mm, Couleur, Son, 2002.
Finger petals 4 min., 16mm, Couleur, Son, 2002.
2e partie
Influences
Oskar Fischinger, Ornament Sound
1932 / 16 mm / Noir et blanc / Son / 7 min. / Allemagne
Ornament Sound utilise la bande son optique de façon unique. En créant des figures graphiques plutôt que les habituelles vaguelettes sur la bande-son, un son «pur» ou «synthétisé» en résulte, pour reprendre le mot de Fischinger. Pour créer cette bande-son, Fischinger coupe des formes qu’il place sur la bande-son, en les photographiant une image à la fois. Lorsque présenté au débit de 24 images secondes, ces images proposent de larges variétés tonales.
Norman McLaren, Blinkity Blank
1955 / 16mm / Coul. / Son / 5 min. / Canada
Ce court film expérimental de McLaren est un joyau d’animation intermittente et d’imagerie spasmodique. En jouant avec les lois de persistance rétinienne, McLaren inscrit des images dans les espaces vides de la pellicule, créant des effets percussifs et vifs. Le film combine une trame sonore pré-enregistrée à une bande-son synthétique.
Barry Spinello, Sonata For Brush, Pen & Ruler
1968 / 16mm /Coul. / Son / 10 min. / USA
Usant de l’esthétique du mouvement cinétique entremêlé à la peinture appliquée directement sur la pellicule créant un ensemble harmonieux, Sonata a été créé sans caméra ni captation sonore, en peignant des milliers d’images sur une bande 16mm vierge. Spinello créé ici son propre style, une progression logique par rapport à ses travaux antérieurs de peintre et musicien. Inspiré par l’approche de McLaren consistant à peindre le son directement sur la bande, Spinello a créé Sonata avec un budget de trois dollars pour la pellicule vierge et cinq pour les bouteilles d’encre, pour un cout total de production de neuf dollars et sept mois de vie (cinquante heures par semaine pendant sept mois – et 16000 images, chacune peinte avec attention et amour.
Barry Spinello, Colored Relations
1970 / 16mm / Coul. / Son / 4 min. / USA
Sons et images produits en solitaire. Lumineux, coloré et drôle.
Norman McLaren, Synchromy
1971 / 16mm / Coul. / Son / 7.5 min. / Canada
Ce court film d’animation de Norman McLaren implique la synchronisation de l’image et du son au sens le plus pur. Pour réaliser ce film, McLaren a utilisé de nouvelles techniques optiques afin de composer des rythmes pianistiques se déplaçant dans l’espace de l’image, sur la pellicule, permettant littéralement de voir ce que l’on entend.
Richard Reeves, Linear Dreams
1997 / 16mm / Coul. / Son / 7 min. / Canada
Comme le dit Reeves, le mot «Linear» est composé de deux mots : «Line» (ligne) et «Ear» (entendre). Le film est la résultante de dessins appliqués directement sur la pellicule, sur les bandes optiques et sonores.
David Gatten, What the Water Said, Nos. 1-3
1997 / 16mm / N et B / Son / 16 min. / USA
Ce film sans caméra est le résultat d’une collaboration entre le cinéaste, l’Océan Atlantique et une cage à crabes. Trois jours en janvier et en octobre 1997, et encore un jour en août 1998, des images non-exposées ont été laissées dans une cage à crabes sur une plage de la Caroline du Sud. Le son et l’image sont ici le résultat d’inscriptions océaniques posées directement sur l’émulsion du film.
Richard Reeves, Element of Light
2004 / 16mm / Coul. / Son / 4.5 min. / Canada
Inspiré des sons de la nature lors d’un voyage. Peint directement sur la pellicule, accompagné d’égratignures.
Jodie Mack, Blanket Statement # 1: Home is Where the Heart Is
2012 / 16mm / Coul. / Son / 3 min. / USA
Représentation de la discordance et du dysfonctionnement.
SONS ORNEMENTAUX : QUATRE-VINGT ANS DE SONS SYNTHÉTIQUES AU CINÉMA.
Présenté avec Available Light Screening Collective, au Studio de Daïmôn, le 27 novembre 2013 à 19h30.
Peu de temps après que la technologie sonore au cinéma se soit développée, à la fin des années 1920, des artistes commencèrent à proposer de nouvelles avenues afin d’utiliser le lecteur de son optique du projecteur et produire de nouveaux sons, entièrement synthétiques. C’est ainsi que toute image ou objet placé sur la bande son de la pellicule de film put enfin se traduire en son lors de la projection.
Le célèbre compositeur John Cage a eu cette réplique fameuse dans son essai «The Future of Music : Credo» (1958), en se référant au son synthétique du film :
Il est maintenant possible pour le compositeur de produire une musique directe, sans le soutien de performeurs. Toute forme gravée, répétée assez souvent sur une trame sonore peut être audible. 280 cercles par seconde sur une trame sonore produiront un son et même le portrait de Beethoven répété cinquante fois par seconde sur une bande sonore aura non seulement une accentuation différente, mais encore une qualité sonore distincte.
Cage avait pris connaissance du son synthétique au cinéma des années auparavant, alors qu’il travaillait comme assistant d’Oskar Fischinger. Le film de Fischinger présenté dans ce programme, Ornament Sound (1932) est le plus ancien exemple de film avant-gardiste usant du son synthétique sans chercher à imiter des sons réels, mais en créant de nouveaux sons inimaginables auparavant.
Cette capacité du film à traduire des images en sons continuera de fasciner à la suite les cinéastes et ce programme rassemble plusieurs figures canoniques du genre, tels que Fischinger, Norman McLaren, Barry Spinello et Richard Reeves. Des cinéastes récents ont pu proposer quelques nouveaux tournants, tels Davis Gatten et Jodie Mack. Quelques uns de ces films contiennent des sons créés méticuleusement en posant des images directement sur la bande-son (Fischinger, McLaren, Spinello, Reeves – c’est aussi le cas pour mon travail, qui sera présenté en deuxième partie de ce programme). D’autres cinéastes altèrent le ratio de l’image de telle sorte que la part accordée à la bande-son soit plus grande (Gatten, Mack). Plusieurs des films présentés dans ce programme sont un défi lancé aux spectateurs. Venez voir/écouter pour vous mêmes des sons jamais entendus autre part, dans ces films incroyables qui remettent en jeu toute conception normative du cinéma !
– Kelly Egan, programmatrice
1ere partie
Films de Kelly Egan
Ransom notes 5 min., 35mm, Couleur, Sound, 2011.
A Firefly 2 min. 35mm, Noir et blanc, Sound, 2007.
C: won eyed jail 5 min., 35mm, Couleur, Sound, 2005.
Transparent “c” 3 min., 16mm, Couleur, Sound, 2005.
Mary/me 4 min., 16mm, Couleur, Sound, 2004.
Object/loss 4 min., 16mm, Noir et blanc, Silent, 2004.
Breath 3 min., 16mm, Couleur, Son, 2003.
Bodies of Knowledge 5.5 min., 16mm, Couleur, Son, 2002.
Finger petals 4 min., 16mm, Couleur, Son, 2002.
2e partie
Influences
Oskar Fischinger, Ornament Sound
1932 / 16 mm / Noir et blanc / Son / 7 min. / Allemagne
Ornament Sound utilise la bande son optique de façon unique. En créant des figures graphiques plutôt que les habituelles vaguelettes sur la bande-son, un son «pur» ou «synthétisé» en résulte, pour reprendre le mot de Fischinger. Pour créer cette bande-son, Fischinger coupe des formes qu’il place sur la bande-son, en les photographiant une image à la fois. Lorsque présenté au débit de 24 images secondes, ces images proposent de larges variétés tonales.
Norman McLaren, Blinkity Blank
1955 / 16mm / Coul. / Son / 5 min. / Canada
Ce court film expérimental de McLaren est un joyau d’animation intermittente et d’imagerie spasmodique. En jouant avec les lois de persistance rétinienne, McLaren inscrit des images dans les espaces vides de la pellicule, créant des effets percussifs et vifs. Le film combine une trame sonore pré-enregistrée à une bande-son synthétique.
Barry Spinello, Sonata For Brush, Pen & Ruler
1968 / 16mm /Coul. / Son / 10 min. / USA
Usant de l’esthétique du mouvement cinétique entremêlé à la peinture appliquée directement sur la pellicule créant un ensemble harmonieux, Sonata a été créé sans caméra ni captation sonore, en peignant des milliers d’images sur une bande 16mm vierge. Spinello créé ici son propre style, une progression logique par rapport à ses travaux antérieurs de peintre et musicien. Inspiré par l’approche de McLaren consistant à peindre le son directement sur la bande, Spinello a créé Sonata avec un budget de trois dollars pour la pellicule vierge et cinq pour les bouteilles d’encre, pour un cout total de production de neuf dollars et sept mois de vie (cinquante heures par semaine pendant sept mois – et 16000 images, chacune peinte avec attention et amour.
Barry Spinello, Colored Relations
1970 / 16mm / Coul. / Son / 4 min. / USA
Sons et images produits en solitaire. Lumineux, coloré et drôle.
Norman McLaren, Synchromy
1971 / 16mm / Coul. / Son / 7.5 min. / Canada
Ce court film d’animation de Norman McLaren implique la synchronisation de l’image et du son au sens le plus pur. Pour réaliser ce film, McLaren a utilisé de nouvelles techniques optiques afin de composer des rythmes pianistiques se déplaçant dans l’espace de l’image, sur la pellicule, permettant littéralement de voir ce que l’on entend.
Richard Reeves, Linear Dreams
1997 / 16mm / Coul. / Son / 7 min. / Canada
Comme le dit Reeves, le mot «Linear» est composé de deux mots : «Line» (ligne) et «Ear» (entendre). Le film est la résultante de dessins appliqués directement sur la pellicule, sur les bandes optiques et sonores.
David Gatten, What the Water Said, Nos. 1-3
1997 / 16mm / N et B / Son / 16 min. / USA
Ce film sans caméra est le résultat d’une collaboration entre le cinéaste, l’Océan Atlantique et une cage à crabes. Trois jours en janvier et en octobre 1997, et encore un jour en août 1998, des images non-exposées ont été laissées dans une cage à crabes sur une plage de la Caroline du Sud. Le son et l’image sont ici le résultat d’inscriptions océaniques posées directement sur l’émulsion du film.
Richard Reeves, Element of Light
2004 / 16mm / Coul. / Son / 4.5 min. / Canada
Inspiré des sons de la nature lors d’un voyage. Peint directement sur la pellicule, accompagné d’égratignures.
Jodie Mack, Blanket Statement # 1: Home is Where the Heart Is
2012 / 16mm / Coul. / Son / 3 min. / USA
Représentation de la discordance et du dysfonctionnement.
Gatineau (Québec) J8Y 3M5