Eliza Griffiths, Interval (Green Interior), oil on canvas, 2012

Pierre Dalpé, Eliza Griffiths et Mariane Bourcheix-Laporte, vernissages le jeudi 13 septembre à la Galerie FOFA

Eliza Griffiths

Amour, aliénation et association libre est le titre d’une série de tableaux et de dessins récents qui explore les enjeux et les notions de besoin personnel et social, de détachement, et d’intimité. Issu d’une matrice conceptuelle comprenant des recherches en psychologie individuelle et collective, en neuroscience, en théâtre, en film et en séries dramatiques télévisées, le langage pictural des peintures suit un modèle ouvert d’association libre appliqué aux évocations et aux connexions indirectes présentées comme forme de conversation à propos de questions existentielles et expérientielles.

La pratique artistique de longue date d’Eliza Griffiths repose sur la création de personnages inventés dans ses peintures, ses dessins et ses installations. Fondées sur les protagonistes, ses œuvres portent sur des fictions littéraires, théâtrales ou cinématographiques qui privilégient une exploration en profondeur des personnages. Ses thèmes mettent de l’avant l’identité de genre, la sexualité, le désir et la psychologie. Au cours des dernières années, Eliza a travaillé sur des séries thématiques, amorçant chacune d’elles avec un cadre conceptuel et laissant ensuite les différentes couches de peinture déterminer la forme et le contenu de ses créations.

Dans cette récente série d’œuvres, des psychodrames épurés et centrés sur les personnages sont contrebalancés par de petites abstractions géométriques et des dessins approximatifs annotés. Cette relation reflète les interstices visuels et mentaux entre de lourds mélodrames finement ciselés, et un langage instinctif non verbal issu de pures associations visuelles.

 

Pierre Dalpé

Les œuvres exposées dans les vitrines du corridor York ont été puisées dans les séries Clothes Minded (1990-1996) et Personae (depuis 1997). Clothes Minded réunit des portraits environnementaux – principalement des diptyques – que j’ai entrepris en 1990 lors de mes études en photographie à l’Université Concordia. L’inspiration de ce corpus provient de mon intérêt pour les jeux entre les sexes, les stéréotypes et la théorie queer, notamment dans les écrits de Judith Butler, de Marjorie Garber et d’Esther Newton. Cette série, où je dépeins mes sujets à différentes étapes de travestisme, explore les rapports binaires entre le masculin et le féminin tout en mettant en lumière les zones grises ambiguës qui se situent entre les sexes. Au cœur de l’ensemble se situe le postulat suivant : nous manifestons une forme ou une autre de travestisme dans notre quotidien puisque notre habillement est, en soi, une construction sociale.

Très différente dans sa forme, la série Personae est néanmoins issue des idées que j’ai explorées dans Clothes Minded. Abordant les notions de sexualité, Personae embrasse le spectre plus large de l’identité. Elle postule que, à titre d’individus, nous incarnons potentiellement une multitude de personnages, que l’identité est fluide et malléable, mais non prédéterminée. Cet ensemble d’œuvres est issu d’un processus de collaboration. En effet, j’ai permis à mes sujets d’exorciser leur alter ego en interprétant un scénario inventé ou en incarnant un récit dans l’arc du proscénium que forme le cadre de mon appareil photo. Le jeu avec l’esthétique et la tradition de la photographie documentaire, ainsi qu’avec des aspects d’identité et de représentation, sous-tendait mon intention. Résultat d’une telle subversion, les spectateurs sont portés à croire à de fausses vérités – ce qui les oblige à remettre en question ce qui se trouve à l’intérieur du cadre.

Les séries Clothes Minded et Personae figurent toutes deux dans une monographie qui sera lancée à la Galerie FOFA le 22 septembre.

 

Biographie

Pierre Dalpé est né à Kindersley, Saskatchewan. Lorsqu’il a sept ans, sa famille s’installe à Montréal où, depuis lors, il a toujours vécu et travaillé. En 1993, il a obtenu un baccalauréat en études cinématographiques et en photographie à l’Université Concordia. Durant les deux dernières décennies, Dalpé a réalisé plusieurs séries d’oeuvres dont Clothes Minded (1990–1996), Backstage (1992–en cours), Wigstock (1992–1995), Personae (1997–en cours) et Teatro Mexico (2010). Fusionnant la photographie analogique et numérique, son travail explore les interconnexions entre le corps, l’identité, le déguisement et la performance. Jouant sur les limites du reportage documentaire et de la mise en scène, Dalpé questionne les idées préconçues qui entourent le portrait photographique et les représentations narratives.

Les oeuvres de Dalpé ont fait l’objet d’expositions au Canada, aux États-Unis, en Russie, au Mexique et en Angleterre. Ses photographies font partie de plusieurs collections privées et ont été publiées dans divers journaux, périodiques et magazines. Il a reçu de nombreuses bourses du Conseil des arts et des lettres du Québec et du Conseil des arts du Canada. Il a participé à des programmes de résidence d’artiste au Banff Centre d’Alberta, au  Klondike Institute of Art and Culture à Dawson City, Yukon, et à un atelier-résidence offert à Mexico par le Conseil des arts et des lettres du Québec.

 

Mariane Bourcheix-Laporte

Les espaces interstitiels sont des espaces résiduels formés au travers de l’architecture et du design d’un environnement. Constituant en quelques sortes de l’espace négatif ou des « non-lieux », les interstices sont des micro-lieux non-définis contenus à l’intérieur d’environnements organisés. Les espaces interstitiels représentent donc des vides empreints de potentiel, qui permettent de tisser de nouvelles relations entre le corps et son environnement.

Cette vidéo présente des explorations physiques d’espaces interstitiels qui parsèment les lieux publics de la ville de Vancouver. Je m’insère dans de tels espaces et y demeure immobile aussi longtemps que possible, c’est-à-dire, jusqu’à ce que je sois interpellée par un passant ou que mon corps n’en puisse plus. La vidéo documente donc les micro-mouvements que mon corps effectue alors qu’il tente de demeurer immobile. Une certaine tension s’établit entre l’effort d’immobilité du corps et le mouvement qui sature l’espace environnant. Demeurant, de façon furtive, relativement immobile dans des lieux publics, la position de mon corps perturbe la construction discursive de ces espaces et la manière dont ceux-ci sont appréhendés par les passants. Les « non-actions » que j’effectue dans des « non-lieux » questionnent ainsi les règles qui régissent le comportement dans la sphère publique et le caractère nomade de la condition urbaine.

Biographie

Mariane Bourcheix-Laporte est une artiste interdisciplinaire et commissaire indépendante vivant présentement à Vancouver où elle termine une maîtrise en arts visuels à l’Université Simon Fraser. Dans sa pratique, elle s’intéresse aux rapports alternatifs avec l’espace et aux espaces alternatifs pour l’art. Ses recherches s’articulent d’abord autour de la relation du corps avec l’environnement construit, de l’interstitiel, et de l’intervention dans la sphère publique, pour ensuite se pencher sur des stratégies de présentation en galerie de ces actions performatives in situ documentées. Récemment, elle a présenté son travail au centre d’artistes Le Labo, à Toronto, a fait partie du Low Lives 4 International Networked Performance Art Festival, et a publié un texte sur le public incident des œuvres d’art furtif dans le dernier numéro de la revue Inter, art actuel. Elle est co-fondatrice du collectif de commissariat et d’édition Palindromes, dont le plus récent projet sera présenté à la Galerie Verticale, à Laval, en novembre et décembre prochains.

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