ORANGE, L’événement dʼart actuel de Saint-Hyacinthe, a le plaisir dʼannoncer la nomination de Céline Mayrand et de Sylvie Tourangeau à titre de commissaires invitées à la 5e édition de sa triennale, qui se tiendra en septembre et octobre 2015.
Pour lʼoccasion, les deux réputées commissaires ont proposé le thème Cru ou cuit, autour duquel sʼarticulera la programmation. Madame Mayrand sera responsable du volet expositions, tandis que Madame Tourangeau pilotera le volet performances.
Cru ou cuit
Depuis une trentaine dʼannées, la popularité du végétalisme, de lʼalimentation vivante ou du « manger cru » connaît une ascension fulgurante. Partout dans le monde, les tartares, les sushis, les sashimis, les crustacés, et les crudités remplissent nos assiettes et le raw food figure au menu dʼun nombre croissant dʼétablissements.
Les producteurs agroalimentaires repoussent les limites du possible afin de répondre à cette demande de plus en plus vorace des crudivores, « consommateurs avertis » par excellence dʼune nourriture saine, dépourvue dʼOGM ou de pesticides. Si la faim justifie les moyens, « manger cru » est encore loin dʼêtre du tout cuit !
Volet expositions
Le cru en art est ce mouvement de lʼâme que rien ne vient entraver. Un geste par lequel le sain et le malsain se réconcilient, où lʼamour et la haine se conjuguent, où la joie et lʼangoisse se confondent. À lʼart « cuit », dont chaque geste relève dʼun choix réfléchi, à saveur de savoir, on peut opposer ou intrinsèquement relier cette pulsion de création relevant davantage de lʼirrationnel. Le cru, en art, est donc cette pulsion première qui donne à la vie un pouvoir sur la mort et qui nʼest rien dʼautre que lʼhumaine définition de lʼart.
Sous ce vocable de « cru » sʼenglobent donc toutes les formes dʼexpression nées de la primordialité, de lʼarchaïsme, de la spontanéité, de lʼautomatisme. Depuis le cru jusquʼau cuit, toute « nourriture » du corps ou de lʼesprit se voit soumise à lʼaction combustible et lumineuse du « feu sacré ». Si la maintenance corporelle des humains est entretenue par lʼalimentation et la respiration, elle lʼest aussi psychiquement par lʼaffect, lʼintellect et le spirituel. Aussi, nous sommes, humains voraces, autant des consommateurs insatiables de symboles que de nutriments. Comment assimile-t-on ou digère-t-on cette nourriture visuelle et culturelle?
Entre le cru et le cuisiné, il y a tout un monde, cette distance phénoménale que lʼon doit franchir. Depuis la pulsion de faim jusquʼà lʼartification du culinaire (la cuisine comme forme de production culturelle et symbolique qui est de plus en plus revendiquée comme « art » au même titre que les arts consacrés que sont la peinture ou la musique) sʼimmiscent les cultes de la nature, les rituels de la culture.
« Manger cru » (raw food), au même titre que lʼ « art cru » (raw art) ne veut pas seulement dire cru, mais aussi brut, naturel, non traité, non transformé, etc. Si dʼemblée le mot « cru » évoque les images dʼune pièce de viande, de chair saignante, tout aussi naturellement il nous renvoie à lʼidée de cette violence dʼun langage direct, cru, sans détours…
Toujours inachevée par essence, lʼœuvre dʼart fondamentalement viscérale se tient dans une certaine indétermination, dans la mouvance. Lʼart qui sʼexpose à la vindicte et qui, de surcroît, « se jette en pâture » au public, se consomme-t-il cru ou cuit ?
Volet performances
Le volet performances témoignera du prolongement de l’apport de la relation au cru et au cuit dans un art où le corps est le matériau principal. Le corps, dans sa capacité à écouter sa pulsion de vie, à se connecter à sa condition d’humain, à se mettre en action, en communication, en relation. Ici, nous visualisons un art vivant porté par une force motrice plus grande que nous, une motivation viscérale, des stratégies inévitables, de la spontanéité, de lʼautomatisme, une contagion assurée.
Le cru vu comme les manifestations brutes et branchées à ce qui est déjà là au dedans et au dehors, mais aussi le cuit dans ses plans de consistance de fines stratégies qui peuvent générer des facteurs de changement face à ce qui nous semble immuable. Nous souhaitons une communauté de performeurs, une présence du performatif à même la ville, qui opère dans ce petit interstice entre la réalité et l’art.
Est-il possible de tracer notre « forme-trajet » qui permette un mouvement de va et vient entre le cru et le cuit dans un contexte d’actions performatives ? En quoi cette synergie des opposés peut-elle qualifier une attitude, une présence et une structure dont le performatif est l’enjeu principal ?
Le domaine entrevu dans le contexte de l’événement ORANGE introduit non seulement les relations intimes, singulières et fort complexes que chacun de nous entretenons à la base avec la nourriture, mais également notre façon de réagir face à cet univers vital, paradoxal et incontournable qu’est lʼindustrie agro-alimentaire.
À propos de lʼévénement
ORANGE se veut une manifestation artistique récurrente, structurée tel un laboratoire de réflexion qui, par le biais dʼexpositions, dʼinterventions et de conférences, aborde les diverses problématiques de lʼart actuel en lien avec la nourriture et lʼagroalimentaire. En présentant des œuvres dʼartistes professionnels du Québec, du Canada et de lʼétranger dans différents endroits de la ville de Saint-Hyacinthe, ORANGE désire entre autres promouvoir les arts visuels au Québec, au Canada et, dʼune façon plus particulière, dans la région hôtesse de lʼévénement. Pour chaque édition, une publication est également produite dans le but de poursuivre la réflexion entamée lors de la tenue de lʼévénement et de documenter les pratiques artistiques.
La première édition de ORANGE, en 2003, présentait les divers aspects liés à la pratique artistique contemporaine et à la nourriture. En 2006, la deuxième édition, como como, a pour sa part emprunté une voie plus politique et les œuvres dʼart présentées questionnaient nos manières de manger. À lʼautomne 2009, dans le cadre de la 3e édition, Il nostro Gusto, la réflexion des commissaires sʼarticulait davantage à partir de la notion dʼéthique dans lʼagroalimentaire. Pour lʼédition 2012, Les Mangeurs, les commissaires ont invité les artistes à se pencher sur les liens entre la nourriture et la mort. La prochaine édition, sur le thème Cru ou cuit, se tiendra en septembre et octobre 2015.
À propos des commissaires
Céline Mayrand vit et travaille à Montréal. Depuis 1986, alors quʼelle dirigeait la Galerie dʼart Lavalin, elle a été commissaire dʼun grand nombre dʼexpositions circulant au Québec et à lʼétranger, notamment en Allemagne, aux États-Unis, en France, en Italie, au Brésil, etc.
Elle est lʼauteure de nombreux essais portant sur lʼart contemporain, plus particulièrement consacrés à la phénoménologie de la perception des œuvres dʼart ou à leur analyse psychanalytique selon les paramètres inconscients de lecture du regardeur (spectateur). En tant quʼartiste, elle travaille actuellement à un projet de mises en scènes photographiques.
Sylvie Tourangeau est artiste, auteure, commissaire et développe une pédagogie en art performance. Depuis 1978, son travail met au premier plan le potentiel de transformation de lʼaction performative alors que ses ateliers collectifs et ses coaching individuels créent un espace actif dʼexpérimentation de la conscience performative. Considérée comme une pionnière de lʼart performance au Canada, elle a publié des livres dʼartistes, près dʼune cinquantaine dʼarticles sur un ensemble de performeurs importants. Elle prépare un ouvrage avec le collectif TouVA sur le mode performatif.
ORANGE, L’événement dʼart actuel de Saint-Hyacinthe, a le plaisir dʼannoncer la nomination de Céline Mayrand et de Sylvie Tourangeau à titre de commissaires invitées à la 5e édition de sa triennale, qui se tiendra en septembre et octobre 2015.
Pour lʼoccasion, les deux réputées commissaires ont proposé le thème Cru ou cuit, autour duquel sʼarticulera la programmation. Madame Mayrand sera responsable du volet expositions, tandis que Madame Tourangeau pilotera le volet performances.
Cru ou cuit
Depuis une trentaine dʼannées, la popularité du végétalisme, de lʼalimentation vivante ou du « manger cru » connaît une ascension fulgurante. Partout dans le monde, les tartares, les sushis, les sashimis, les crustacés, et les crudités remplissent nos assiettes et le raw food figure au menu dʼun nombre croissant dʼétablissements.
Les producteurs agroalimentaires repoussent les limites du possible afin de répondre à cette demande de plus en plus vorace des crudivores, « consommateurs avertis » par excellence dʼune nourriture saine, dépourvue dʼOGM ou de pesticides. Si la faim justifie les moyens, « manger cru » est encore loin dʼêtre du tout cuit !
Volet expositions
Le cru en art est ce mouvement de lʼâme que rien ne vient entraver. Un geste par lequel le sain et le malsain se réconcilient, où lʼamour et la haine se conjuguent, où la joie et lʼangoisse se confondent. À lʼart « cuit », dont chaque geste relève dʼun choix réfléchi, à saveur de savoir, on peut opposer ou intrinsèquement relier cette pulsion de création relevant davantage de lʼirrationnel. Le cru, en art, est donc cette pulsion première qui donne à la vie un pouvoir sur la mort et qui nʼest rien dʼautre que lʼhumaine définition de lʼart.
Sous ce vocable de « cru » sʼenglobent donc toutes les formes dʼexpression nées de la primordialité, de lʼarchaïsme, de la spontanéité, de lʼautomatisme. Depuis le cru jusquʼau cuit, toute « nourriture » du corps ou de lʼesprit se voit soumise à lʼaction combustible et lumineuse du « feu sacré ». Si la maintenance corporelle des humains est entretenue par lʼalimentation et la respiration, elle lʼest aussi psychiquement par lʼaffect, lʼintellect et le spirituel. Aussi, nous sommes, humains voraces, autant des consommateurs insatiables de symboles que de nutriments. Comment assimile-t-on ou digère-t-on cette nourriture visuelle et culturelle?
Entre le cru et le cuisiné, il y a tout un monde, cette distance phénoménale que lʼon doit franchir. Depuis la pulsion de faim jusquʼà lʼartification du culinaire (la cuisine comme forme de production culturelle et symbolique qui est de plus en plus revendiquée comme « art » au même titre que les arts consacrés que sont la peinture ou la musique) sʼimmiscent les cultes de la nature, les rituels de la culture.
« Manger cru » (raw food), au même titre que lʼ « art cru » (raw art) ne veut pas seulement dire cru, mais aussi brut, naturel, non traité, non transformé, etc. Si dʼemblée le mot « cru » évoque les images dʼune pièce de viande, de chair saignante, tout aussi naturellement il nous renvoie à lʼidée de cette violence dʼun langage direct, cru, sans détours…
Toujours inachevée par essence, lʼœuvre dʼart fondamentalement viscérale se tient dans une certaine indétermination, dans la mouvance. Lʼart qui sʼexpose à la vindicte et qui, de surcroît, « se jette en pâture » au public, se consomme-t-il cru ou cuit ?
Volet performances
Le volet performances témoignera du prolongement de l’apport de la relation au cru et au cuit dans un art où le corps est le matériau principal. Le corps, dans sa capacité à écouter sa pulsion de vie, à se connecter à sa condition d’humain, à se mettre en action, en communication, en relation. Ici, nous visualisons un art vivant porté par une force motrice plus grande que nous, une motivation viscérale, des stratégies inévitables, de la spontanéité, de lʼautomatisme, une contagion assurée.
Le cru vu comme les manifestations brutes et branchées à ce qui est déjà là au dedans et au dehors, mais aussi le cuit dans ses plans de consistance de fines stratégies qui peuvent générer des facteurs de changement face à ce qui nous semble immuable. Nous souhaitons une communauté de performeurs, une présence du performatif à même la ville, qui opère dans ce petit interstice entre la réalité et l’art.
Est-il possible de tracer notre « forme-trajet » qui permette un mouvement de va et vient entre le cru et le cuit dans un contexte d’actions performatives ? En quoi cette synergie des opposés peut-elle qualifier une attitude, une présence et une structure dont le performatif est l’enjeu principal ?
Le domaine entrevu dans le contexte de l’événement ORANGE introduit non seulement les relations intimes, singulières et fort complexes que chacun de nous entretenons à la base avec la nourriture, mais également notre façon de réagir face à cet univers vital, paradoxal et incontournable qu’est lʼindustrie agro-alimentaire.
À propos de lʼévénement
ORANGE se veut une manifestation artistique récurrente, structurée tel un laboratoire de réflexion qui, par le biais dʼexpositions, dʼinterventions et de conférences, aborde les diverses problématiques de lʼart actuel en lien avec la nourriture et lʼagroalimentaire. En présentant des œuvres dʼartistes professionnels du Québec, du Canada et de lʼétranger dans différents endroits de la ville de Saint-Hyacinthe, ORANGE désire entre autres promouvoir les arts visuels au Québec, au Canada et, dʼune façon plus particulière, dans la région hôtesse de lʼévénement. Pour chaque édition, une publication est également produite dans le but de poursuivre la réflexion entamée lors de la tenue de lʼévénement et de documenter les pratiques artistiques.
La première édition de ORANGE, en 2003, présentait les divers aspects liés à la pratique artistique contemporaine et à la nourriture. En 2006, la deuxième édition, como como, a pour sa part emprunté une voie plus politique et les œuvres dʼart présentées questionnaient nos manières de manger. À lʼautomne 2009, dans le cadre de la 3e édition, Il nostro Gusto, la réflexion des commissaires sʼarticulait davantage à partir de la notion dʼéthique dans lʼagroalimentaire. Pour lʼédition 2012, Les Mangeurs, les commissaires ont invité les artistes à se pencher sur les liens entre la nourriture et la mort. La prochaine édition, sur le thème Cru ou cuit, se tiendra en septembre et octobre 2015.
À propos des commissaires
Céline Mayrand vit et travaille à Montréal. Depuis 1986, alors quʼelle dirigeait la Galerie dʼart Lavalin, elle a été commissaire dʼun grand nombre dʼexpositions circulant au Québec et à lʼétranger, notamment en Allemagne, aux États-Unis, en France, en Italie, au Brésil, etc.
Elle est lʼauteure de nombreux essais portant sur lʼart contemporain, plus particulièrement consacrés à la phénoménologie de la perception des œuvres dʼart ou à leur analyse psychanalytique selon les paramètres inconscients de lecture du regardeur (spectateur). En tant quʼartiste, elle travaille actuellement à un projet de mises en scènes photographiques.
Sylvie Tourangeau est artiste, auteure, commissaire et développe une pédagogie en art performance. Depuis 1978, son travail met au premier plan le potentiel de transformation de lʼaction performative alors que ses ateliers collectifs et ses coaching individuels créent un espace actif dʼexpérimentation de la conscience performative. Considérée comme une pionnière de lʼart performance au Canada, elle a publié des livres dʼartistes, près dʼune cinquantaine dʼarticles sur un ensemble de performeurs importants. Elle prépare un ouvrage avec le collectif TouVA sur le mode performatif.