Montréal dépose sa proposition de Politique de développement culturel

Stéphane Baillargeon
Édition du mardi 30 août 2005

Ce devait être la fête de Montréal comme métropole culturelle, mais les échos du gros party qui se prépare à Toronto l’ont un peu assombrie.

Alors que Francine Senécal, vice-présidente du comité exécutif, dévoilait la nouvelle Politique de développement culturel à l’hôtel de ville, hier après midi, elle n’a pu s’empêcher de faire elle-même référence aux investissements massifs d’environ un demi-milliard de dollars réalisés dans les équipements culturels de la capitale ontarienne. Par contraste, Montréal n’a rien de sonnant et trébuchant à annoncer pour donner corps à ses volontés.

«Notre propre stratégie doit se définir autrement que par le soutien aux grandes institutions, a dit Mme Senécal, lors de la conférence, en évoquant clairement le contraste du modèle ontarien. La grande force de Montréal vient de sa puissance créatrice. C’est dans la création que se définit notre ville, et c’est là que se situe son avantage stratégique.» En entrevue au Devoir, elle a ensuite répété qu’investir dans les infrastructures était important, mais insuffisant. «Nous préférons miser sur les créateurs», a-t-elle résumé.

La Politique intitulée Montréal, métropole culturelle mise donc sur cette première force dont les festivals constitueraient une des expressions majeures. Le soutien aux arts et à la culture constitue en fait un des trois axes majeurs du document d’une soixantaine de pages avec l’accessibilité aux productions culturelles et la valorisation des arts, de la culture et du patrimoine dans la vie quotidienne des citadins.

«Toronto a adopté une politique culturelle qui s’avère une politique d’affaires, a commenté Simon Brault, vice-président du Conseil des arts du canada et président de Culture Montréal, après la conférence de presse.

Cette ville se donne des moyens pour devenir une capitale de classe internationale d’ici dix ans. Montréal choisit une voie à l’européenne, comme Barcelone, en misant sur une vison et sur ses particularités créatives. Mais il faut quand même des moyens pour réaliser ce rêve.»

Le document liste 38 engagements de l’administration. L’un d’eux, déjà annoncé, répète que Montréal amorce un plan de rattrapage pour mettre d’ici dix ans les bibliothèques municipales au niveau de la moyenne des grandes villes canadiennes. Pour le reste, Montréal ne peut pas annoncer l’injection massive de fonds, loin de là. L’Hôtel de Ville avertit même que ses contributions à la culture ne pourront augmenter sans modifications du cadre fiscal actuel. Montréal se bat depuis des années pour obtenir de Québec la possibilité de diversifier ses sources de revenus.

Mme Senécal a promis que les nouvelles sommes éventuellement versées au budget municipal seraient redonnées aux secteurs des arts et de la culture dans les proportions actuelles. À ce sujet, la vice-présidente, responsable du dossier de la culture, rappelait que les ordres supérieurs de gouvernement ne finançaient pas la culture à la même hauteur qu’elle-même. Avec son budget de 10 millions, le Conseil des arts de Montréal reçoit 0,25 % des contributions de la Ville, tandis que le Conseil des arts et des lettres du Québec ne draine que 0,88 % du budget de la province et le Conseil des arts du Canada 0,13 % des contributions totales fédérales. «Nous dépensons deux fois plus que Québec et trois fois plus qu’Ottawa en cette matière, a noté Mme Senécal. Il faut que ces deux gouvernements fassent beaucoup plus d’efforts pour soutenir les créateurs.»

La Politique déposée hier devait être adoptée tard hier soir par le conseil municipal. Cette étape marque l’aboutissement de plusieurs années de travail. Le maire Bourque avait promis de baliser les actions de la ville après le Sommet de Montréal en 2002. Un groupe-conseil a déposé un rapport en 2003, puis un projet a fait l’objet de discussions publiques.

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