DES ENJEUX MAJEURS DE GOUVERNANCE
Il reste à peine un an avant que les projecteurs ne se braquent sur un événement destiné à réunir, en même temps et au même endroit, vision, volonté politique, engagement civique et décisions fermes d’investir dans l’avenir de Montréal comme métropole d’art et de culture.
Convoqué pour novembre 2007, le Sommet Montréal métropole culturelle, pourrait bien être celui de la dernière chance. Et cela, dans la mesure où nous assistons depuis deux ans à une érosion accélérée de notre capacité à décider et à agir et à l’expansion d’un discours défaitiste qui blâme les résistances que provoque l’annonce de projets majeurs insuffisamment planifiés ou expliqués.
N’étant pas une capitale politique, n’étant plus un centre économique puissant, souffrant de stagnation démographique et subissant une concurrence féroce sur tous les fronts, Montréal pourrait aussi bientôt devoir faire le deuil des avantages rattachés au statut de métropole culturelle. En effet, si elle se cantonne dans la morosité et si elle s’englue dans le capharnaüm de ses innombrables structures politico-administratives, Montréal se privera du développement auquel lui permettent encore d’aspirer l’impétueuse créativité de ses artistes et le dynamisme tenace de ses institutions culturelles.
Pour l’heure, le niveau de création, de production, de diffusion et d’exportation de manifestations et d’oeuvres artistiques n’est pas en perte de vitesse. Peut-être sommes-nous en pleine crise de croissance? Au-delà des retombées économiques et sociales et des emplois liés au foisonnement culturel de son territoire, Montréal profite de l’aura de métropole que lui procurent ses artistes en brillant partout sur la planète. Mais Montréal ne pourra continuer à être le creuset de tant de créativité artistique et de production culturelle, qu’à condition de miser intelligemment sur son unicité comme métropole nord-américaine, sur sa réalité de deuxième plus grande ville francophone du monde, son bilinguisme historiquement assumé, ses pratiques interculturelles fondées sur l’accueil et l’inclusion, ses apports d’échanges avec le reste du Québec, ses choix ancrés dans la justice sociale et la démocratisation culturelle, et sur sa volonté de se projeter à l’échelle continentale et internationale. Mais, comme pour le vin, le meilleur terroir ne peut produire de grands crus sans une stratégie et des investissements conséquents sur le plan de l’nologie.
Montréal ne sera pas la métropole culturelle qu’elle peut être si elle ne dispose pas d’infrastructures de formation, de recherche, de conservation, de production et de diffusion de la meilleure qualité. Et il y a encore beaucoup à faire de ce côté en dépit des avancées importantes des 15 dernières années. Il y a des espaces supplémentaires à construire et des lieux à rénover ou à améliorer. Les investissements publics et privés qu’il faut prioriser sont sans doute ceux qui permettent d’optimiser les capacités de création et l’accès aux uvres et aux productions qui nous distinguent, comme métropole valorisant la contemporanéité, l’ancrage réel dans la population, dans la ville et l’authenticité.
Il faudra aussi augmenter l’accès à des ressources financières adéquates et stables pour les créateurs, les compagnies artistiques et les institutions culturelles, tant ceux qui sont établis et reconnus que ceux qui émergent et qui comment à percer. Ici, on interpellera la ville et les gouvernements, sans oublier d’inviter avec insistance le milieu des affaires à prendre une part plus manifeste dans cette entreprise.
Le processus de préparation du Sommet 2007 convoqué par Culture Montréal, la Chambre de Commerce du Montréal Métropolitain, la Ville, et les ministres directement responsables de la région de Montréal, est à peine enclenché. Les devoirs de rigueur et de transparence qui incombent à chacune de ces cinq entités sont à la hauteur du défi de résultat qu’elles ont décidé de relever. Pour éviter l’improvisation et la précipitation qui seraient des réponses bien tentantes à l’immobilisme ambiant, il faut prendre appui sur l’intelligence de notre destin culturel qui s’est articulé au cours des trois dernières années. Ainsi, les consensus qui sont en filigrane des politiques du patrimoine et de la culture que vient d’adopter la Ville, légitimeront un exercice de gouvernance destiné à combler le déficit actuel de centralité, de cohérence et de ralliement de toutes les forces capables de façonner la métropole culturelle.
En effet, la réussite de ce Sommet est tributaire d’un engagement à revoir la gouvernance culturelle pitoyable et dépassée dont nous sommes affublés et que nous empirons jusqu’à l’absurde, avec la multiplication des instances dont les pouvoirs et les attributs alimentent le morcellement dans la vision comme dans l’action. L’épisode des fusions/défusions, en amont comme en aval, aura été particulièrement nocif à cet égard avec l’ajout d’une kyrielle de structures régionales et locales à la constellation de ministères, d’agences, de commissions et de sociétés d’état qui agissent sur notre trajectoire. À l’instar de tant d’autres villes qui ont décidé d’affirmer leur statut de métropole culturelle, Montréal est mûre pour un grand ménage des structures et des instruments qui peuvent influencer son développement. Le Sommet ne pourra donc éviter de régler une partie des problèmes de gouvernance qui en commandent aussi impérativement sa tenue.
Simon Brault
Président de Culture Montréal
DES ENJEUX MAJEURS DE GOUVERNANCE
Il reste à peine un an avant que les projecteurs ne se braquent sur un événement destiné à réunir, en même temps et au même endroit, vision, volonté politique, engagement civique et décisions fermes d’investir dans l’avenir de Montréal comme métropole d’art et de culture.
Convoqué pour novembre 2007, le Sommet Montréal métropole culturelle, pourrait bien être celui de la dernière chance. Et cela, dans la mesure où nous assistons depuis deux ans à une érosion accélérée de notre capacité à décider et à agir et à l’expansion d’un discours défaitiste qui blâme les résistances que provoque l’annonce de projets majeurs insuffisamment planifiés ou expliqués.
N’étant pas une capitale politique, n’étant plus un centre économique puissant, souffrant de stagnation démographique et subissant une concurrence féroce sur tous les fronts, Montréal pourrait aussi bientôt devoir faire le deuil des avantages rattachés au statut de métropole culturelle. En effet, si elle se cantonne dans la morosité et si elle s’englue dans le capharnaüm de ses innombrables structures politico-administratives, Montréal se privera du développement auquel lui permettent encore d’aspirer l’impétueuse créativité de ses artistes et le dynamisme tenace de ses institutions culturelles.
Pour l’heure, le niveau de création, de production, de diffusion et d’exportation de manifestations et d’oeuvres artistiques n’est pas en perte de vitesse. Peut-être sommes-nous en pleine crise de croissance? Au-delà des retombées économiques et sociales et des emplois liés au foisonnement culturel de son territoire, Montréal profite de l’aura de métropole que lui procurent ses artistes en brillant partout sur la planète. Mais Montréal ne pourra continuer à être le creuset de tant de créativité artistique et de production culturelle, qu’à condition de miser intelligemment sur son unicité comme métropole nord-américaine, sur sa réalité de deuxième plus grande ville francophone du monde, son bilinguisme historiquement assumé, ses pratiques interculturelles fondées sur l’accueil et l’inclusion, ses apports d’échanges avec le reste du Québec, ses choix ancrés dans la justice sociale et la démocratisation culturelle, et sur sa volonté de se projeter à l’échelle continentale et internationale. Mais, comme pour le vin, le meilleur terroir ne peut produire de grands crus sans une stratégie et des investissements conséquents sur le plan de l’nologie.
Montréal ne sera pas la métropole culturelle qu’elle peut être si elle ne dispose pas d’infrastructures de formation, de recherche, de conservation, de production et de diffusion de la meilleure qualité. Et il y a encore beaucoup à faire de ce côté en dépit des avancées importantes des 15 dernières années. Il y a des espaces supplémentaires à construire et des lieux à rénover ou à améliorer. Les investissements publics et privés qu’il faut prioriser sont sans doute ceux qui permettent d’optimiser les capacités de création et l’accès aux uvres et aux productions qui nous distinguent, comme métropole valorisant la contemporanéité, l’ancrage réel dans la population, dans la ville et l’authenticité.
Il faudra aussi augmenter l’accès à des ressources financières adéquates et stables pour les créateurs, les compagnies artistiques et les institutions culturelles, tant ceux qui sont établis et reconnus que ceux qui émergent et qui comment à percer. Ici, on interpellera la ville et les gouvernements, sans oublier d’inviter avec insistance le milieu des affaires à prendre une part plus manifeste dans cette entreprise.
Le processus de préparation du Sommet 2007 convoqué par Culture Montréal, la Chambre de Commerce du Montréal Métropolitain, la Ville, et les ministres directement responsables de la région de Montréal, est à peine enclenché. Les devoirs de rigueur et de transparence qui incombent à chacune de ces cinq entités sont à la hauteur du défi de résultat qu’elles ont décidé de relever. Pour éviter l’improvisation et la précipitation qui seraient des réponses bien tentantes à l’immobilisme ambiant, il faut prendre appui sur l’intelligence de notre destin culturel qui s’est articulé au cours des trois dernières années. Ainsi, les consensus qui sont en filigrane des politiques du patrimoine et de la culture que vient d’adopter la Ville, légitimeront un exercice de gouvernance destiné à combler le déficit actuel de centralité, de cohérence et de ralliement de toutes les forces capables de façonner la métropole culturelle.
En effet, la réussite de ce Sommet est tributaire d’un engagement à revoir la gouvernance culturelle pitoyable et dépassée dont nous sommes affublés et que nous empirons jusqu’à l’absurde, avec la multiplication des instances dont les pouvoirs et les attributs alimentent le morcellement dans la vision comme dans l’action. L’épisode des fusions/défusions, en amont comme en aval, aura été particulièrement nocif à cet égard avec l’ajout d’une kyrielle de structures régionales et locales à la constellation de ministères, d’agences, de commissions et de sociétés d’état qui agissent sur notre trajectoire. À l’instar de tant d’autres villes qui ont décidé d’affirmer leur statut de métropole culturelle, Montréal est mûre pour un grand ménage des structures et des instruments qui peuvent influencer son développement. Le Sommet ne pourra donc éviter de régler une partie des problèmes de gouvernance qui en commandent aussi impérativement sa tenue.
Simon Brault
Président de Culture Montréal