Le RCAAQ demande un changement de direction au RAAV

Montréal, le 14 janvier 2010. Lors des travaux du Comité L’Allier qui se sont terminés le 17 décembre dernier, les représentants du Regroupement des artistes en arts visuels (RAAV), présents lors de ces discussions, ont été incapables de convaincre les représentants des regroupements nationaux qu’ils étaient à même d’apporter des mesures positives et raisonnées qui puissent améliorer la diffusion et la production des pratiques des arts visuels, des arts interdisciplinaires et des arts médiatiques. Aucun consensus n’ayant été atteint, le Rapport de Me L’Allier ne pourra que proposer des modifications mineures à la loi S-32.01 sur le Statut de l’artiste. En réponse à cet état de fait, le RAAV vient de rendre public un document intitulé Mémoire en prévision du budget 2010-2011 du Gouvernement du Québec. Sous prétexte de déposer des demandes budgétaires auprès du gouvernement québécois, le directeur général du RAAV, Christian Bédard, reprend les demandes qui ont été rejetées par les milieux visés par la loi S-32.01 ou jugées non pertinentes lors des débats du Comité L’Allier.

Sur le terrain, le RAAV continue un combat tout azimut pour tenter de rendre son association crédible auprès du public et auprès de la ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine comme en fait foi le dépôt de ce mémoire. Or la crédibilité du RAAV est au plus bas tant auprès des artistes en arts visuels que ceux des arts médiatiques et des arts interdisciplinaires, représentés par le Regroupement des centres d’artistes autogérés du Québec (RCAAQ), le Conseil québécois des arts médiatiques (CQAM) et le Regroupement des arts interdisciplinaires du Québec (RAIQ), lors des discussions du Comité L’Allier. Comme nous avons pu le vérifier durant les sessions de travail, les associations en présence remettaient en question la crédibilité du RAAV à travers sa prétention de représenter et de parler au nom de l’ensemble des artistes du milieu de l’art contemporain dans les secteurs touchant la diffusion, la production ou portant sur la condition des artistes lorsque ces sujets sont abordés. L’on ne saurait trop insister sur la vitalité actuelle du réseau d’organismes créés par les artistes depuis les années 1970. Cette vitalité se vérifie via une communauté dont les appuis proviennent de ses membres et des non membres – des artistes exposants, des artistes sympathisants – qui participent à la croissance du réseau en arts visuels, en arts médiatiques et en arts interdisciplinaires. Rappelons que, bien avant l’arrivée du RAAV sur la scène publique, les centres d’artistes ont défendu, promu et payé les droits d’exposition que la Loi sur le droit d’auteur reconnaissait aux artistes à partir de 1988. Ils n’ont aucune leçon à recevoir du RAAV à ce chapitre.

Les tentatives répétées du RAAV pour « civiliser » les diffuseurs (musées et centres d’artistes) se sont traduites par un recul des gains que les artistes avaient réalisés depuis 1988. En 2007, le RAAV annonçait avec tambour et trompette la signature d’une entente avec l’Association des musées canadiens (AMC) fixant le droit d’exposition recommandé à 1 500 $. Or, le taux recommandé par CARFAC à l’époque atteignait 1 700 $. Le RAAV, par cette entente, avalisait une regrettable régression au chapitre du paiement des droits d’auteur. Les résultats de cette négociation ont miné la confiance dans les barèmes recommandés par CARFAC et n’ont en aucun cas amélioré la situation des artistes lors de la signature de leurs contrats avec des diffuseurs, que ces derniers soient des centres d’artistes ou des musées. On s’étonne que le RAAV ne nous ait jamais fait connaître les résultats de ce merveilleux traité de paix!

D’autre part, on comprend mal que le RAAV veuille dicter au Conseil des arts et des lettres du Québec ses actions dans la gestion des bourses aux artistes des arts visuels. Le RAAV se lance-t-il maintenant dans des démarches que nous estimons maladroites à l’égard du CALQ, tout simplement pour obtenir la sympathie des artistes? Or le RAAV reconnaît que 15% seulement de son membership reçoit des bourses du CALQ. Comment peut-on croire à une quelconque légitimité de sa part dans la défense d’artistes boursiers qui ne sont pas membres chez lui et dont les œuvres sont montrées dans les centres d’artistes et les musées? Qui est le mieux placé pour parler au nom des meilleures politiques pour la diffusion et la production des œuvres des artistes en art contemporain? Le RAAV? Ou plutôt le RCAAQ et les centres d’artistes qui agissent au plus près des intérêts et des actions nécessaires à la reconnaissance de l’art québécois contemporain. Le CALQ a modifié sensiblement son offre de bourses aux artistes des arts visuels après une large consultation à la grandeur du Québec des artistes et de leurs organismes. Les modifications ont rencontré l’approbation des artistes et répondent mieux à la diffusion et à la production des œuvres. D’autres améliorations pourraient être apportées, tant de la part du CALQ que de la part du Conseil des Arts du Canada; les échanges sont permanents entre nos organismes et les conseils pour réaliser ces ajustements.

L’ambition du RAAV de s’exprimer au nom des artistes en arts visuels nous apparait actuellement basée exclusivement sur la volonté de transformer le RAAV en syndicat de travailleurs, chargé de régenter la diffusion et la production d’œuvres alors que ce qui est en jeu n’a rien à voir avec des relations de travail. Les deux dirigeants du RAAV – le directeur et sa présidente –  auraient dû prendre acte de la défaite de leurs options devant le Comité L’Allier.

Nous reviendrons éventuellement sur l’ensemble des recommandations qui émanent de leur Mémoire en prévision du budget 2010-2011 du Gouvernement du Québec. Contentons-nous pour le moment de contester la pertinence de leurs recommandations. On s’étonnera entre autres que le RAAV recommande à la ministre de punir les organismes qui refuseraient de signer une entente avec le RAAV! Ou d’une recommandation qui suggère à Loto Québec d’établir une loterie spéciale pour le soutien des arts et de la culture québécoise : quelle modernité!

En conclusion, ce que le RAAV recherche ce n’est pas tant la défense des artistes que le renforcement de sa position associative afin d’obtenir le droit exclusif de parler en leur nom. Or, nos milieux ne sont en aucune façon prêts à leur concéder cette position. Le RAAV a une énorme côte à remonter s’il persiste dans les directions que lui impriment l’actuel directeur et sa présidente. Les artistes qui croient à cette association devraient réfléchir sérieusement à la portée des attaques du RAAV contre les acteurs du milieu – soit les centres d’artistes, les musées et leurs regroupements – qui agissent sur les scènes nationales et internationales et qui font progresser la carrière des artistes.

Source : RCAAQ, 514 842 3984

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