L* de Marie-Michelle Deschamps, vernissage le mercredi 10 mai à 17h à la Galerie UQO

En conversation avec Gabriel Dharmoo, Michelle Lacombe, Bryan-K. Lamonde et Anne-Marie Proulx

Commissaire : Anne-Marie St-Jean Aubre
Exposition présentée en collaboration avec la Fonderie Darling

La fascination de Marie-Michelle Deschamps pour les langues, les glissements de sens, la graphie et la calligraphie, les matériaux du langage, qu’il s’agisse du graphite, du papier comme support ou de la voix comme organe, l’a menée naturellement vers la figure de Louis Wolfson, linguiste à la méthode singulière, qui a par la suite informé tout un pan de ses recherches. « Étudiant de langues schizophrénique », Wolfson habite l’espace d’exposition de Deschamps, telle une présence en creux au cœur de toutes les conversations qui composent son projet.
 
Le visiteur est invité à pister sa trace au fur et à mesure de sa déambulation et de ses lectures. Tour à tour il passe devant sa table et ses outils de travail ; l’imagine à sa fixation sur les modes de prononciation dépendant de l’emplacement de la langue dans son rapport au palais et aux maxillaires; ou le reconnaît dans sa compulsion à épuiser le sens d’un mot en lui faisant subir un processus de traduction qui l’ouvre aux effets des coïncidences, des émotions et de la subjectivité. Sa méthode d’apprentissage, ou plutôt de désapprentissage, implique un processus d’associations d’idées et de déclinaisons phonétiques et sémantiques afin de remplacer l’anglais, sa langue maternelle avec laquelle il entretient un rapport trouble, en permutant ses vocables avec d’autres issus du russe, du français, de l’hébreu et de l’allemand.
 
C’est ce procédé linguistique misant sur les associations de mots étrangers, les combinaisons et permutations de préfixes et suffixes, ouvrant ainsi la langue aux sonorités et significations étrangères en révélant les forces hétérogènes qui la traverse, qui a donné envie à Deschamps de faire de « l’écho » le moteur de L*. D’où l’invitation à quatre artistes qui s’intéressent à la langue (en tant que système) et au langage (en tant que fonction d’expression et de communication qui recourt au code qu’est la langue) à mettre en résonance leur pratique artistique avec la sienne.

Marie-Michelle Deschamps explore dans son travail les problématiques du processus de signification, et joue avec les frontières fragiles qui organisent le monde. De la lettre au mot, du mot à l’image et à l’objet, ses installations dissèquent, déconstruisent et réinventent le langage pour mieux interroger la relation entre les mots et les choses, et ce, en donnant à voir entre les lignes du texte le langage comme expérience.
 
Les œuvres sculpturales de Deschamps en acier émaillé blanc, qui rappellent les retailles de papier qui les inspirent, deviennent des feuilles surdimensionnées pliées, rognées, déchirées, perforées; des supports muets qui flottent en état d’entre-deux. Son intérêt pour la langue, thème central de sa démarche artistique depuis ses débuts, se manifeste de diverses façons dans son travail, qui en aborde autant les outils (graphie, prononciation) que les effets de sens (traduction, jeux de mots).
 
Née à Montréal en 1980, elle est revenue s’y installer après avoir vécu en Suisse, et après avoir obtenu une maîtrise en arts visuels de la Glasgow School of Art en 2012. Ses expositions récentes comprennent The Working Day, Galerie Gregor Staiger, Zurich (2017); That Cool Decline, Occidental Temporary, Paris (2016); L*, Fonderie Darling, Montréal (2016). Prochainement elle présentera son travail au Austellungraum Kligenthal, Basel et à YYZ, Toronto.

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