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© Julie Roch-Cuerrier, Temporal Fabric, 2019, de la série Temporal Bodies, vert-de-gris sur soie, dimensions variables
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Vers des cycles mouvants

Exposition du 5 juin au 12 septembre à EXPRESSION

Commissaires : Joséphine Rivard et Ariel Rondeau
En collaboration avec le Jardin Daniel A. Séguin

Une exposition collective avec KUH DEL ROSARIO, JULIE ROCH-CUERRIER, INGRID TREMBLAY

La matière vit, se transforme, prolifère ; elle poursuit une trajectoire essentielle à sa vitalité. Végétaux, roches, plastiques, humains, électricité, rebuts, métaux, elle s’inscrit dans un ensemble de relations processuelles et interconnectées. Elle perdure, incessante et cyclique, qu’elle soit désirée ou importune, naturelle ou fabriquée.

La présence active de cette matière dans notre quotidien appelle à la conscience son pouvoir d’emmagasiner récits, mémoires et affects, nous obligeant, nous, êtres humains, à reconcevoir notre rôle et notre regard sur elle et à nous repositionner au cœur d’un monde en mouvance. En nous distanciant de cette conception binaire opposant vivant et non-vivant, sujet et objet, il s’agit désormais de reconnaître l’engagement de la matière et sa capacité à impacter le monde.

Cette question que pose l’autrice Jane Bennett renvoie à notre propre capacité d’agir, mais, cette fois, en tournant notre regard vers un potentiel rapport d’équité avec la force expressive des entités qui nous entourent. Comment agir nous-mêmes en tant que matière vibrante, mais, surtout, comment nous engager humblement avec cette énergie vitale qui habite les êtres non vivants ?

Kuh Del Rosario récupère et intègre choses du quotidien et matières naturelles à ses œuvres installatives, se positionnant en égale avec elles et tentant d’en dégager de nouveaux récits. Par la combinaison et l’exploration de la notion d’alchimie, elle sauve ces matériaux d’une perte probable, prolongeant en quelque sorte leur souffle.

À travers une pratique sculpturale, installative et photographique, Julie Roch-Cuerrier explore les processus de transformation de la matière, se prêtant à une observation méticuleuse du passage du temps. On y décèle une présence marquée du vert-de-gris, fruit de l’oxydation du cuivre, qui ouvre la voie à une forme spectrale de matérialisation du temps, l’artiste recyclant inlassablement ce pigment instable dans ses différents corpus.

Le travail d’Ingrid Tremblay accorde une place de choix à la trace – celle laissée par le temps, la nature, le geste sculptural, les souvenirs. Par un travail acharné et une propension pour diverses techniques de fabrication à la fois traditionnelles et contemporaines, elle met en lumière la matière comme porteuse de mythologies, autant personnelles que partagées.

En s’inscrivant dans la foulée des théories néo-matérialistes, cette exposition remet en question la relation anthropocentriste de l’humain avec la matière, et cette idée que celle-ci ne répond qu’à ses fins. Reconnaître aujourd’hui ce pouvoir actif de la matière, c’est admettre que l’entreprise humaine n’est plus l’unique dominance. L’agentivité humaine, liée à une conception inerte de la matière et qui s’est longtemps imposée sur notre écologie et nos ressources, pourrait-elle maintenant être réévaluée ? Ne pourrions-nous pas considérer un monde où vivant et non-vivant s’imbriquent respectueusement dans une écologie vitaliste ?