Andrew Forster et André Martin, vernissages le vendredi 5 septembre à 17 h à la Galerie B-312

5 septembre — 4 octobre 2008

Andrew Forster — Duet

La Galerie B-312 est heureuse d’accueillir dans sa petite salle Duet, une installation vidéographique qu’Andrew Forster a réalisée avec la collaboration des danseurs Monique Romeiko et Robert Schweitzer. On y voit le corps d’un personnage masculin, qui est commandé par une obscure volonté. Un personnage féminin entre alors en scène pour accompagner le personnage masculin dans la reconquête de la maîtrise de ses gestes.

La situation est privée de tout contexte. Pas de lieu, pas de temps ni d’action déterminés ; seulement un duel combiné à un duo : un duel entre un corps et une force invisible en train d’en prendre possession ; un duo de deux êtres, où les gestes de l’un s’accordent à ceux de l’autre. L’oeuvre n’est pas linéaire. La double dialectique de l’affrontement et de la concorde, qui y est présentée, se rejoue sans cesse sans trouver de terme, sinon celui d’ouvrir un espace de réflexion sans limite sur la question du mobile du geste. Qu’est-ce qui pousse à poser tel geste ? Quelle est la raison d’être de tel mouvement ?

En représentant le geste vidé de son mobile, Duet est en mesure d’illustrer bien des situations où le geste est impliqué, à commencer par celle de la création du geste dans le domaine de la danse. En sachant que la chorégraphie du personnage masculin est un écho à la scène, abondamment diffusée par les médias d’information, de l’arrestation d’Hassam Abdo, un jeune homme de 14 ans interpellé le 24 mars 2004 par l’armée israélienne à un point de contrôle en Cisjordanie, une tout autre réflexion s’engage alors, qui exige de distinguer geste et action sans toutefois exclure l’art comme une forme d’action. Geste et action, duel ou duo ?

—Jean-Émile Verdier

André Martin — Le point fou

La Galerie B-312 présente dans sa grande salle Le point fou, le plus récent travail d’André Martin. Un texte au mur et quatre oeuvres accueillent le visiteur. L’exposition s’inscrit dans la veine de Mes Modèles – autoportraits (Musée d’art contemporain de Montréal, 2000) et de Mes Modèles – leurs portraits (Galerie Circa, 2002). À ceci près cependant : le paysage se substitue au portrait.
« […] je dois renoncer aux portraits », écrit André Martin dans Mes Modèles – Snapshot, une autofiction en voie d’être publiée. « Désormais, poursuit-il, je ferai des paysages. Des vues de points de fuite vers l’infini, points fous, points de non-retour ».

Chaque oeuvre est une photographie imprimée à même un panneau de bois, subdivisé ensuite en 36 tableautins, trempés un à un dans un bain de cire liquide, puis rassemblés pour reconstituer l’image initiale, cette fois recouverte d’une couche de cire mouvementée dont l’apparence laiteuse opacifie plus ou moins l’image. L’artiste, comme en guise de signature, finira par creuser dans l’épaisseur de la cire une expression latine. Le texte conduira-t-il le regard : ce que nous lirons se reconnaîtra-t-il dans les images, et ce que nous y verrons, le texte aura-t-il su le nommer ? N’en révélons que ceci : jamais les apparats de la fiction dont la vérité se masque n’auront été aussi pénétrants. Imprégnés par le sens du texte, nous verrons les images fuir, se fragmenter, s’effacer, et nous assigner ainsi ce point de vue inouï d’où apparaît la disparition même. Le point fou pousse le genre du memento mori à son paroxysme : L’oeuvre n’expose pas la mort, elle nous expose à elle. Et puis, certains détails épingleront les sens, la vue pour commencer, mais l’ouïe et l’odorat aussi. On sentira l’air de la galerie chargé d’une odeur de cire, des marques de fabrication apparaîtront, des rencontres inopinées de matières et de formes se produiront. Ces petits événements, anodins au premier abord, seront autant de négations adressées à quelques conclusions que ce soient. Pas de point final donc, chez André Martin, qui ne soit pulvérisé en une infinité de particules disséminées à la surface du sensible.

—Jean-Émile Verdier

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